jeudi 1 janvier 2015

Braque à l'hôtel Roma

Après une trop longue interruption, je reprends l’animation de ce blog. Il faut dire que l’automne a été chargé, avec la fin du travail pour Montmartre, les lieux de légende, à paraître au printemps chez Parigramme, et l’écriture intense d’une petite vie de Bonnard, Bonnard, jardins secrets, à paraître en mars aux éditions de la Table Ronde, directement en format poche, dans la collection « la petite Vermillion ». Ce dernier livre accompagnera la tenue d’une grande exposition Bonnard à la mi-mars au Musée d’Orsay. J’aurai bien sûr l’occasion d’y revenir sous peu.

Mais aujourd’hui, afin de renouer le fil, un petit extrait du livre à venir, concernant une adresse peu connue, mais qui a eu son importance : l’hôtel Roma (actuellement Hôtel Roma Sacré-Cœur), où le peintre Georges Braque a vécu et travaillé pendant un an et demi.
La façade de l'hôtel Roma (actuellement Roma-Sacré-Cœur), côté rue Caulaincourt.
La chambre-atelier de Braque donnait de l'autre côté, tout en haut.


Nous sommes au début de l’année 1913. Depuis l’automne précédent, Picasso est désormais à Montparnasse, boulevard Raspail. Braque quitte l’impasse Guelma pour installer ici son atelier.

La petite chambre de Braque, modernisée

Kahnweiler se souvient : « L’atelier de Braque se trouve dans un hôtel de Montmartre. D’innombrables marches, des femmes en combinaison viennent chercher leur eau chaude… Tout en haut, il y a l’atelier. Une cage de verre, un phare, une clarté lumineuse. Tout autour, un balcon qui domine Paris. Des œuvres en grand nombre, peintes, collées, reliefs en bois, en papier ou en carton. Beaucoup de petits objets aux murs et sur les tables. Braque travaille en chantant comme un peintre en bâtiment. À l’aide de jumelles, il montre aux visiteurs la ville d’Argenteuil, berceau de sa famille, située à flanc de colline au loin ». Argenteuil, sa ville natale.
Vue de la "lanterne", le balcon de Braque, vers l'Est de Paris

 
Vue du balcon vers le Nord-Ouest parisien et sa banlieue, notamment Argenteuil où le peintre est né
Mais les visiteurs sont peu nombreux ; Braque n’aime pas être dérangé. Un jour, il n’ouvre même pas la porte à son père venu de Normandie lui rendre visite ! Mais le travail avant tout.


En février 1914, Braque façonne une étonnante petite construction en papier qui est comme l’érection en trois dimensions de ses papiers collés. De son côté, Picasso a réalisé une installation Construction au joueur de guitare, qui s’intègre à l’atelier : un tableau accroché au mur, tableau duquel sortent deux bars de papier tenant comme pour en jouer une vraie guitare, suspendue au plafond. Braque, lui, place son installation dans un coin de mur de sa chambre d’hôtel, une sorte de tablette soutenant une bouteille de papier journal sur lequel on voit ressortir le mot ART, divers cylindres, un journal. Il ne subsiste de cette œuvre que cette photographies prise par Kahnweiler en février 1914.


La sculpture-installation de Braque photographiée par son galeriste Kahnweiler

Le coin de la chambre où se trouvait la sculpture-installation de Braque


A tous, une très belle, lumineuse, artistique, poétique année 2015.