Après une trop longue
interruption, je reprends l’animation de ce blog. Il faut dire que l’automne a
été chargé, avec la fin du travail pour Montmartre,
les lieux de légende, à paraître au printemps chez Parigramme, et l’écriture
intense d’une petite vie de Bonnard, Bonnard, jardins secrets, à paraître en mars aux éditions de la Table
Ronde, directement en format poche, dans la collection « la petite
Vermillion ». Ce dernier livre accompagnera la tenue d’une grande
exposition Bonnard à la mi-mars au Musée d’Orsay. J’aurai bien sûr l’occasion d’y
revenir sous peu.
Mais aujourd’hui, afin de renouer
le fil, un petit extrait du livre à venir, concernant une adresse peu connue, mais
qui a eu son importance : l’hôtel Roma (actuellement Hôtel Roma Sacré-Cœur),
où le peintre Georges Braque a vécu et travaillé pendant un an et demi.
La façade de l'hôtel Roma (actuellement Roma-Sacré-Cœur), côté rue Caulaincourt. La chambre-atelier de Braque donnait de l'autre côté, tout en haut. |
Nous sommes au début de l’année
1913. Depuis l’automne précédent, Picasso est désormais à Montparnasse,
boulevard Raspail. Braque quitte l’impasse Guelma pour installer ici son
atelier.
La petite chambre de Braque, modernisée |
Kahnweiler se souvient :
« L’atelier de Braque se trouve dans un hôtel de Montmartre.
D’innombrables marches, des femmes en combinaison viennent chercher leur eau
chaude… Tout en haut, il y a l’atelier. Une cage de verre, un phare, une clarté
lumineuse. Tout autour, un balcon qui domine Paris. Des œuvres en grand nombre,
peintes, collées, reliefs en bois, en papier ou en carton. Beaucoup de petits
objets aux murs et sur les tables. Braque travaille en chantant comme un
peintre en bâtiment. À l’aide de jumelles, il montre aux visiteurs la ville
d’Argenteuil, berceau de sa famille, située à flanc de colline au loin ».
Argenteuil, sa ville natale.
Vue de la "lanterne", le balcon de Braque, vers l'Est de Paris |
Mais les visiteurs sont peu
nombreux ; Braque n’aime pas être dérangé. Un jour, il n’ouvre même pas la
porte à son père venu de Normandie lui rendre visite ! Mais le travail
avant tout.
En février 1914, Braque façonne
une étonnante petite construction en papier qui est comme l’érection en trois
dimensions de ses papiers collés. De son côté, Picasso a réalisé une
installation Construction au joueur de
guitare, qui s’intègre à l’atelier : un tableau accroché au mur,
tableau duquel sortent deux bars de papier tenant comme pour en jouer une vraie
guitare, suspendue au plafond. Braque, lui, place son installation dans un coin
de mur de sa chambre d’hôtel, une sorte de tablette soutenant une bouteille de
papier journal sur lequel on voit ressortir le mot ART, divers cylindres, un
journal. Il ne subsiste de cette œuvre que cette photographies prise par
Kahnweiler en février 1914.
La sculpture-installation de Braque photographiée par son galeriste Kahnweiler |
Le coin de la chambre où se trouvait la sculpture-installation de Braque |
A tous, une très belle, lumineuse, artistique, poétique année 2015.